En 1910 et pour la première fois depuis des siècles, la première puissance économique n'est plus européenne. La Grande-Bretagne n'est plus qu'un empire fatigué, l'Allemagne ne parvient pas à se sortir du corset de sa position continentale, la France court déjà après le mythe de sa puissance passée, l'Empire austro-hongrois se désagrège et la Russie ne parvient pas à se moderniser. L'Europe n'est en fait qu'une plaie ouverte, malade de ses rancœurs de ses jalousies, de son incapacité à se réformer. L'espoir d'un nouveau monde se trouve ailleurs, aux États-Unis.
"Ah, Dieu, que la guerre est jolie" écrit Guillaume Apollinaire. L'euphorie des premières semaines mène à la désillusion. Rien ne se déroule comme prévu. La France a perdu la bataille des frontières, l'Allemagne est sur les rives de la Marne. Pendant quatre interminables années, les belligérants vont tenter de briser cette ligne obsédante des tranchées, ajoutant de nouveaux noms au long martyrologe de l'humanité : Ypres et les premiers gaz de combat, Verdun et ses 300 jours et 300 nuits de combat, la Somme et sa boue. Les nations les plus développées du monde rivalisent de génie pour inventer des armes mortelles : chars de combat, aviation, artillerie lourde, cuirassés... Et l'Europe, dans son suicide, entraîne le monde entier.
Lorsque finalement l'Allemagne, écrasée sous le nombre, épuisée économiquement et minée par la révolution, accepte la capitulation en 1918, les nations triomphantes l'accablent encore davantage et sèment les germes de la future guerre, sans régler un seul des problèmes en suspens en 1914.
© Éditions Autrement (4e de couverture)